Pourtant, bien que je soutienne l’idée, à priori louable, d’organiser une telle rencontre, je m’empêche, après réflexion, de me rendre à une soirée qui risque fort de servir des calculs politiciens et des intérêts personnels et étroits et qui, hypocritement, va cacher les luttes intestines qui minent le camp de ceux qui sont sensés se battre côte à côte contre l’intégrisme.
De plus, je m’empêche – et je m’empêcherai désormais – de prendre la parole aux côtés des « résistants de la dernière heure » et je pense notamment au représentant du quotidien Libération, dont le journal n’a eu de cesse d’insulter et de calomnier le camp de ceux qui, parmi les intellectuels et les journalistes, se battent depuis déjà plusieurs années contre l’obscurantisme. Ayaan Hirsi Ali, mais aussi beaucoup de démocrates algériens, ont eu droit à la mauvaise foi d’un journal dont le but a été, à maintes reprises, de jeter le doute et le discrédit, sur ceux qui vomissent l’islamisme en dédouanant au passage les tenants de cette idéologie, de leurs innombrables crimes.
De plus, le représentant de ce journal nous a bien montré lors du meeting contre l’ADN qu’il se prenait désormais pour le leader de « l’opposition à l’ère Sarkozy » et qu’il ne comptait donc pas lutter pour des valeurs mais davantage pour ses intérêts et ceux de son journal. Je pense, en effet, que ce qu’il l’intéresse, avant toute chose, ce ne sont pas les principes mais la publicité à réaliser et les bénéfices à tirer, par le biais de telles actions, pour un journal qui ne cesse, aux yeux de beaucoup de femmes et d’hommes de gauche, de perdre en crédibilité et qui, sans nul doute, manque de sérieux et de cohérence surtout sur cette question de l’islamisme.
Je ne me rendrai pas à cette soirée parce que je sens la récupération politique dégager sa puanteur. Comment expliquer sinon la présence d’une Ségolène Royal dont l’objectif n’est autre que de trouver des tribunes qui l’a mettraient en orbite pour 2012 alors qu’elle s’était très prudemment empêché, en sa qualité de candidate, de s’exprimer, entre autres, sur l’affaire des caricatures ? Comment expliquer la présence probable de membres d’un gouvernement qui estime que « l’instituteur ne pourra jamais remplacer le curé » ou que les wahhabites saoudiens sont l’incarnation de la civilisation musulmane ?
Je ne me rendrai pas à cette soirée parce que je refuse qu’on me dise, quand bien même ce serait mes amis, ce que j’ai à dire ou ce que je ne dois surtout
pas dire. Je refuse qu’on m’impose une « bien-pensance », je refuse qu’on me dicte la démagogie et enfin je refuse qu’on m’apprenne l’hypocrisie. En somme, je refuse qu'on me considère,
même involontairement, comme l'Arabe ou le musulman de service, celui qu'on sort du chapeau lorsqu'on organise des soirées pour dénoncer les islamistes et leurs agissements criminels.
Je n’irai donc pas à cette soirée parce que je n’aime pas, non plus, cette lutte fratricide que se livre en coulisses ces féministes de « Ni putes ni soumises » et leur dissidentes les « Insoumises » ainsi que leurs parrains et marraines respectifs. Deux associations désormais rivales et donc privées de figurer sur la tribune alors que les membres des deux associations ont, à ma connaissance, soutenu Ayan Hirsi Ali et le combat qu’elle symbolise, beaucoup plus que certains des intervenants.
Enfin, je ne me rendrai pas à cette soirée parce que je ne supporte pas cette pression si discrète, si subtile et si hypocrite exercée sur les organisateurs par certains caciques du PS et autres coulissiers de la gauche. Une « pression amicale » qui appelait à « virer » de la tribune l’eurodéputé Benoît Hamon sous prétexte qu’il ne représentait pas le « bon courant », la « bonne clique » ou la « bande » alors qu’il a été le seul – ou l’un des rares – à mener une action concrète au niveau du Parlement européen en faveur d’Ayaan Hirsi Ali.
Je n’aime pas – il est vrai – cette conception de la démocratie et du combat qui fait passer les copains avant les idées ; les intérêts avant les valeurs ; les calculs avant les principes.
A Caroline Fourest, à Bernard-Henri Lévy, à Philippe Val, à Dominique Sopo et à l’ensemble de mes amis, je dirai : vous avez eu certainement raison d’organiser cette soirée, je connais votre sincérité et votre détermination à lutter contre l’infâme mais si nous devons continuer à lutter, côte à côte, nous devons revoir à la fois la méthode et débattre sur les objectif de notre combat.